Pivot de l’émancipation individuelle, la mobilité est primordiale pour accéder à l’emploi, à la santé, aux commerces, aux loisirs, aux activités du quotidien, aux droits et à la citoyenneté. En France, 13,5 millions de personnes sont en situation de précarité mobilité. Les difficultés éprouvées sont souvent multiples et cumulatives.
Publié le 18 septembre 2024
Selon une enquête du Laboratoire de la Mobilité inclusive publiée en 2017, près d’un quart des Français aurait renoncé à un travail ou une formation professionnelle faute de moyen pour se déplacer. Cette entrave à la mobilité touche surtout les jeunes (46%) et les personnes les plus fragiles socialement (54%). « En matière d’accès à l’emploi, la mobilité est un frein premier. Certaines personnes n’ont pas le permis, pas les moyens de se le payer ou ne peuvent pas conduire pour des raisons de santé. Elles ont des problématiques financières ou de logement. Les difficultés se cumulent », alerte Muriel Balluais. Cette conseillère en insertion professionnelle au Plie Est Héraultais de Lunel accompagne les plus de 46 ans éloignés de l’emploi. « Je reçois des femmes qui n’ont aucun moyen de locomotion », poursuit-elle. Ce déficit de mobilité diminue les chances de recrutement et peut conduire à l’isolement social. Pour permettre à ces publics vulnérables d’être autonomes et d’élargir leur périmètre de mobilité, le Plie Est Héraultais leur met à disposition des trottinettes électriques. Muriel Balluais fait aussi appel à l’Association de prévention spécialisée de l’Hérault (APS34).
L’APS34 répare, prête et donne des vélos. Cette association oeuvre pour l’insertion ou la promotion sociale des jeunes les plus en marge et leurs familles dans les quartiers prioritaires de la ville. Des éducateurs animent des ateliers d’autoréparation de vélos dans les quartiers défavorisés du Pays de Lunel, Montpellier Mosson et Marsillargues « Certains participants n’ont ni vélo ni moyen de transport accessible. Nous prêtons ou donnons des vélos à des jeunes en recherche d’emploi et des personnes âgées qui en ont besoin pour aller chercher leurs médicaments ou faire leurs courses », explique Yohan Lazary, en service civique. L’association s’emploie à inculquer la culture du vélo et la liberté de déplacement qui lui est associée. « Le vélo permet aux bénéficiaires de se présenter à des entretiens d’embauche et de travailler en dehors de leur ville », ajoute Muriel Balluais. Le vélo est un mode de transport efficace pour favoriser l’accessibilité à la mobilité sur des trajets urbains et périurbains de courtes et moyennes distances. Sa promotion permet de développer localement une mobilité durable et inclusive… mais pour cela, il est nécessaire pour les publics d’être accompagnés et encadrés
Adhérente du réseau Mob’In Auvergne-Rhône Alpes, l’association Mobilité 07-26 mène des actions autour du vélo dans toute l’Ardèche. Elle propose des ateliers pour reprendre confiance, se perfectionner, rouler en sécurité ou découvrir le vélo électrique. Sophi s’est remise en selle à 65 ans. « Je voulais réapprendre à faire du vélo pour pouvoir me déplacer, faire un peu d’exercice et des balades. J’avais très peur mais l’encadrante m’a mise en confiance », retrace-t-elle. Cette infirmière libérale retraitée subit au quotidien des entraves à la mobilité. Son mari est atteint d’un handicap moteur. Il se déplace à l’aide d’un fauteuil roulant. « J’ai énormément de difficultés à me déplacer dans le Teil : centre-ville inaccessible, rampes et trottoirs inadaptés, manque de places de parking réservées », fustige-t-elle.
Selon le Laboratoire de la Mobilité inclusive, 30 % des Français auraient renoncé à se rendre à un rendez-vous médical et 26 % à faire des courses alimentaires faute de solution de mobilité. Se déplacer constitue un droit fondamental. Partout, les dispositifs de mobilité solidaire et durable se multiplient. Les actions portées par l’APS34 et Mobilité 07-26 sont d’ailleurs lauréates du programme Tims. « Pour favoriser une mobilité inclusive, il faut augmenter les initiatives et sensibiliser sur les aides existantes », soutient Muriel Balluais. Des propos qui rejoignent ceux de l’économiste Pierre Taillant : « Il faut cartographier les solutions existantes dans les territoires, créer des ponts entre les différents types de mobilité et imaginer des solutions qui vont déverrouiller les freins. »