Décryptage

Repenser nos modes de transport et nos besoins de mobilité

Comment l'ADEME participe-t-elle à intégrer les mobilités durables et inclusives dans une transition juste ? Réponse avec Pierre Taillant, du service transport et mobilité de l'ADEME

Publié le 5 novembre 2024

Qu’est-ce qu’une transition juste ?

Pierre Taillant : L’idée de « transition juste » est née du refus de légitimer l’inaction en matière environnementale au nom des pertes d’emploi qui découleraient des politiques mises en œuvre. Il faut mener des actions efficaces d’un point de vue écologique, malgré des problèmes économiques, sociaux et politiques qu’elles pourraient poser, et mettre en place d’autres actions pour pallier ou répartir de façon équitable ces effets négatifs : arrêt ou mutation des activités brunes et développement des activités vertes en tenant compte des vulnérabilités propres aux différentes composantes de nos sociétés et de nos économies.

Quelle est la place des mobilités durables et inclusives ?

PT : Les transports étant le premier émetteur d’émissions de gaz à effet de serre en France, nous devons collectivement transformer nos mobilités en tenant compte d’une autre réalité : les plus riches ont une mobilité quasi illimitée et fort impact environnemental tandis que les plus modestes restreignent leurs déplacements aux besoins essentiels du quotidien. Une personne sur quatre déclare être contrainte dans sa mobilité. Plus isolés, avec une capacité de résilience moins importante et peu ou pas d’alternatives, les plus modestes sont pourtant les plus
impactés par les mesures environnementales de court terme, ce qui risque d’aggraver les inégalités. Pour éviter cette « double peine », il faut construire des politiques et des solutions plus inclusives tout en respectant les limites de notre planète. La transition écologique donne l’occasion de repenser notre système tant sur nos modes de transports que sur nos besoins de mobilité, pour transformer l’organisation de nos territoires et aller vers une société plus sobre et plus égalitaire.

“La transition écologique donne l’occasion de repenser notre système tant sur nos modes de transports que sur nos besoins de mobilité”

Pierre Taillant

Economiste au service Transport et Mobilité de l'ADEME

Comment l’ADEME s’est-elle emparée des questions de mobilité ? 

PT : L’ADEME soutient depuis plus de dix ans les travaux du Laboratoire de la Mobilité Inclusive et mène des partenariats bilatéraux avec des
réseaux d’acteurs comme le réseau Mob’In. Les travaux conduits ont permis de mieux caractériser les barrières à la mobilité des différents publics fragiles, de les chiffrer et de faire des propositions pour inciter les acteurs de la mobilité et de l’inclusion à coopérer pour agir. Mais il faut aller plus loin ! Un des principaux enjeux est celui du passage à l’échelle dans l’accompagnement des personnes : sur environ 13 millions de personnes précaires dans leur mobilité, seuls 100 000 sont accompagnées chaque
année. Le programme Tims, qui s’appuie sur 70 projets, doit contribuer à disséminer des actions sur tous types de territoires et permettre aux acteurs de se former, de se structurer, d’améliorer la mise en œuvre de solutions et d’évaluer les
impacts environnementaux, économiques et sociaux des projets.

Quel futur pour la mobilité durable et inclusive ? 

La politique et les actions dans le domaine de la mobilité inclusive sont à la croisée de nombreux enjeux. Il peut être difficile de mettre ces éléments en cohérence sur le terrain. Souvent, l’urgence et les contraintes financières poussent à traiter certaines situations avec des solutions symboliques de
court terme, alors que construire une mobilité inclusive et durable pour tous nécessite une nouvelle approche politique qui réponde aux besoins du quotidien et investisse dans des infrastructures qui soutiennent les solutions de demain.

Au niveau des territoires, ces enjeux doivent être intégrés et partagés par les acteurs des mobilités, du social et de l’emploi pour construire des Plans d’action pour la mobilité solidaire (PAMS) ambitieux. En s’inscrivant dans des dynamiques d’innovation sociale et territoriale, en portant la voix des plus précaires, ces acteurs sont au cœur des solutions de demain. L’éducation et l’accompagnement au changement ont aussi un rôle à jouer pour expliquer le coût écologique et économique des transports individuels et présenter les alternatives de mobilité aux plus jeunes qui seront les consommateurs de demain et aux adultes qui doivent être responsabilisés dès aujourd’hui.

 

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