Le baromètre de l’éducation des Apprentis d’Auteuil s’est intéressé en 2024 à l’impact de la mobilité sur l’insertion sociale et professionnelle des jeunes accompagnés par la fondation. Les trois quarts d’entre eux ont déjà renoncé à un emploi ou à une formation à cause d’un problème de mobilité.
Publié le 13 mars 2025
En transports en commun ou en voiture, en zone urbaine ou rurale, se déplacer lorsque l’on a entre 18 et 25 ans n’est pas toujours évident. C’est ce qui ressort de l’étude menée auprès de 2000 jeunes accompagnés par les Apprentis d’Auteuil. Manque de transports en commun, horaires peu fiables, tarifs d’abonnement trop élevés, ou bien moyens financiers trop justes pour passer le permis, acheter et entretenir un véhicule, 76 % d’entre eux ont renoncé au moins une fois à un emploi ou à une formation parce qu’ils n’avaient pas de solution de transport.
Une réalité qu’observe au quotidien Clément Baticle, chef de projet de la Locomotiv’ chez les Apprentis d’Auteuil des Alpes-Maritimes. “Nous accompagnons des personnes âgées de 16 à 29 ans qui viennent nous voir en nous disant “je cherche un emploi ou une formation mais personne ne me prend parce que je n’ai pas le permis”, ou qui ont trouvé un emploi mais ne savent pas comment y aller, ou encore qui ne connaissent pas les tarifs réduits auxquels elles pourraient avoir droit.” Lieu dédié à la mobilité inclusive, la Locomotiv’ essaye alors de lever ces freins par différents moyens. Du plus simple comme expliquer le réseau de transports et le système de tarification, jusqu’au financement d’un abonnement au TER ou la location de vélos électriques.
Des jeunes peu attirés par les mobilités douces
“Le passage du permis n’est pas la première solution que nous proposons mais nous avons bien conscience que c’est la meilleure solution pour beaucoup de personnes, concède Clément Baticle. C’est pourquoi nous organisons aussi des ateliers sur le Code de la route et la Sécurité routière, et que nous conseillons ceux qui ont un projet permis.” Le baromètre des Apprentis d’Auteuil fait d’ailleurs apparaître qu’au quotidien, 68 % des jeunes interrogés préfèrent utiliser la voiture plutôt que les transports en commun (32 %), et seulement 24 % se déplacent à vélo au moins une fois par semaine.
Ce qui n’étonne pas Thibault Hardy. Chargé de projet au sein du Réseau vélo et marche, il travaille sur la promotion des mobilités actives dans les quartiers prioritaires de la politique de la Ville (QPV) où elles sont moins utilisées que dans les territoires hors-QPV. L’usage du vélo y est par exemple de 1,9 % contre 2,8 % hors-QPV. “Comme partout, la question des infrastructures, de la vitesse et du stationnement sécurisé sont déterminants dans sa pratique. Mais il y a aussi des facteurs plus spécifiques aux QPV, comme le fait de pouvoir acheter et entretenir un vélo, et de bien savoir se déplacer avec. Il y a aussi une question d’image. Pour certains jeunes, il est associé soit à l’enfance, soit au loisir, et peu à un mode de déplacement crédible. Cette image plutôt négative peut aussi renvoyer soit à “un truc de bobos”, soit à la livraison de repas. Alors que la voiture, elle, est considérée comme un symbole de réussite.
Dans les QPV, le vélo est associé à une image plutôt négative. Soit à “un truc de bobos”, soit à la livraison de repas. Alors que la voiture, elle, est considérée comme un symbole de réussite.
Changer l’image du vélo
Pourtant, comme le promeut le Réseau vélo et marche, le vélo est moins coûteux qu’une voiture, et peut être vecteur d’emplois en lien avec la cyclologistique, la vente, la réparation et l’animation. Des atouts qui ne suffisent pas à convaincre les jeunes vivant en QPV. “Pour y arriver, il est essentiel que les collectivités continuent de développer des infrastructures adaptées et que les bailleurs sociaux aménagent des locaux sécurisés, souligne Thibault Hardy. Mais il faut aussi faciliter l’accès au vélo par des aides financières et des ateliers d’apprentissage. Les moments festifs autour du vélo et des événements comme le voyage à vélo organisé l’été dernier par Banlieues Climat permettent également de montrer d’autres modèles et d’inspirer les jeunes.”