Décryptage

Financer la mobilité inclusive : l’étude du Laboratoire de la Mobilité Inclusive recommande de mobiliser 300 millions d’euros supplémentaires

Le Laboratoire de la Mobilité Inclusive a sorti une étude sur le financement de la mobilité inclusive. Menée par le cabinet Auxilia, cette étude recommande de mobiliser chaque année 300 millions d’euros supplémentaires. Décryptage avec Francis Demoz, directeur du Laboratoire de la Mobilité Inclusive

Publié le 20 novembre 2025

Quelle est la genèse de cette étude ?

Francis Demoz : Le Laboratoire de la Mobilité Inclusive a souhaité lancer cette étude pour répondre à un constat simple : aucun chiffre clé n’existait jusqu’ici sur les financements de la mobilité inclusive en France. En posant des chiffres là où il n’y en avait pas, cette étude permet, pour la première fois, d’identifier clairement le poids économique du secteur de la mobilité inclusive en France, le nombre d’acteurs et de personnes accompagnées annuellement ainsi que les sources de financements. Ces chiffres-clés essentiels offrent une photographie précise de la mobilité inclusive en France. Par ailleurs, cette étude s’inscrit parfaitement dans la continuité logique des travaux conduits par le Laboratoire de la Mobilité ces dernières années, visant à poser un cadre méthodologique pour soutenir le passage à l’échelle de la mobilité inclusive et en mesurer les impacts.

L’étude établit pour la première fois des données de référence jusqu’ici inexistantes, selon une méthodologie originale qui propose deux approches complémentaires : une démarche bottom-up, centrée sur l’analyse des modèles économiques des acteurs de terrain afin de caractériser la typologie « moyenne » ou « dominante » de leurs modes de financement et d’en estimer le volume financier global, et une démarche top-down, centrée sur l’écosystème des financeurs, visant à caractériser leurs modes de financement et à en estimer le volume financier global. Les deux approches bottom up et top down ont été croisées de façon à affiner les estimations quantitatives et à proposer des données consolidées sur l’état des lieux des financements de la mobilité inclusive en France.

Quels sont les principaux résultats de l’étude ?

F.D. : En France, le secteur de la mobilité inclusive représente un poids économique estimé à près de 150 millions d’euros annuels. En moyenne, le budget annuel d’un acteur du secteur se situe autour de 400 000 €, dont 90 % de fonctionnement et 10 % d’investissement. En 2024, 200 000 Français concernés ont bénéficié d’un accompagnement personnalisé dans leur mobilité, pour accéder à une formation, se rendre à un emploi, et dans une moindre mesure accéder aux autres besoins essentiels de la vie quotidienne, notamment la santé et les services administratifs.

Le secteur public, avec près de 70 % du total des financements des acteurs en 2024, est le principal financeur du secteur de la mobilité inclusive. Il intervient via des subventions, des appels à projet ou des marchés publics ; l’autofinancement pèse 18 %, le financement privé 4 %. Les départements sont les premiers financeurs de la mobilité inclusive, avec une implication toutefois variable selon les territoires, avec un montant global de financement estimé à 31 millions d’euros en 2024, soit un montant moyen par structure d’environ 85 000 € par an

Par ailleurs, l’étude donne des chiffres clés sur le statut des acteurs de la mobilité inclusive. La mobilité inclusive s’appuie sur plus de 350 acteurs privés de terrain issus de l’économie sociale et solidaire. Ils constituent la principale cible de l’étude. Ils ont pour mission d’accompagner les personnes vulnérables d’un point de vue social et économique, dans leur mobilité, vers les services essentiels de la vie quotidienne ou vers l’emploi. Parmi ces acteurs, plus de 9 acteurs sur 10 sont des associations loi 1901. Ce statut juridique prédominant traduit l’ancrage du secteur dans l’économie sociale et solidaire et facilite l’accès à des financements publics ou privés.

F.D. : Quelles perspectives pour le financement de la mobilité durable et inclusive ?

Les résultats de cette étude conduisent à une recommandation centrale : mobiliser 300 millions d’euros supplémentaires pour le financement de la mobilité durable et inclusive chaque année, qui viendraient s’ajouter aux 150 millions déjà mobilisés chaque année, financements assurés notamment par les collectivités territoriales. L’objectif de cette recommandation est de consolider et pérenniser les financements de la mobilité inclusive, permettant ainsi de toucher progressivement une large population fragile et de réduire durablement la précarité mobilité. Pour atteindre cet objectif, l’étude a identifié six sources de financement possibles :

  • 50 millions d’euros financés par les recettes générées par l’activité des acteurs de la mobilité inclusive et/ou des financements complémentaires à l’initiative des collectivités territoriales
  • 50 millions d’euros annuels supplémentaire, provenant du versement de mobilité,
  • 50 millions d’euros annuels supplémentaires en provenance des amendes liées à la sécurité routière
  • 50 millions d’euros annuels supplémentaires en provenance des CEE
  • 50 millions d’euros annuels supplémentaires en provenance des entreprises dans le cadre de leur politique RSE, des fondations et des fonds de dotation
  • 50 millions d’euros annuels supplémentaires en provenance du Fonds Social Européen et du Fonds européen de développement régional

Ces financements permettraient d’accompagner 600 000 bénéficiaires en situation de précarité mobilité, alors qu’aujourd’hui seulement 200 000 personnes sont accompagnées.

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